Je pense qu'il y a là matière à réflexion.
L'expérience me pousse à comparer les trois dernières phases (post opératoires) à ce qui est ordinairement vécu dans l'entreprise au terme de la procédure de consultation. Dans les jours qui suivent la remise de l'avis un distinguo s'opère au sein du corps social entre ceux qui vont partir et ceux qui restent, néanmoins la coexistence va durer plusieurs semaines. Pour ces deux catégories le choc « opératoire » est réel et demande, pour le moins, un suivi particulier. Très souvent la mise en place d'un dispositif de suivi des salariés qui vont ou qui souhaitent quitter l'entreprise est mis en place mais plus rarement un tel dispositif s'étend à l'ensemble des salariés. Or pouvoir à ce stade exprimer des doutes voire même des griefs est indispensable. A ce moment précis même les « rescapés » se considèrent comme des victimes, au moins potentielles à défaut d'être réelles. Outre le travail d'écoute qui caractérise cette phase il est important de redonner progressivement des perspectives, non pas sur le long terme, mais sur le court/moyen terme (6 à 12 mois) en demandant aux managers de proximité (nos praticiens habituels) de reconstruire la confiance au plus près du terrain et surtout pas via des messages institutionnels de la direction ou autres réunions plénières.
Après quelques mois, la scission physique est opérée entre ceux qui restent et les autres. L'homogénéité de la population permet de réutiliser les outils habituels de communication et plus largement de management.
Dans cette seconde phase post opératoire il faudra être vigilant aux différences en matière de « récupération » entre les individus. Il s'agit ni plus ni moins de ce qui nous est enseigné concernant les phases de la courbe du changement dont le rythme est variable d'une personne à une autre. Nous pouvons ici parler de phase de convalescence active. On peut outiller les managers et les inciter à mener régulièrement des réunions collectives de service, mais aussi accorder le temps nécessaire à des entretiens individuels en recentrant progressivement sur des objectifs de « business ».
Enfin, au terme de la première année qui suit l'annonce de la restructuration le retour à une vie « normale » ( mais jamais identique à ce qui était avant la restructuration !) doit être assuré. C'est donc le bon moment pour réinterroger toutes les composantes de la politique sociale et RH (recrutement, développement, rémunération?) ce qui permettra d'élaborer un nouveau projet adapté à une donne différente. Je ne saurais trop recommander, pour en terminer, de veiller à la bonne adéquation entre le sens de ce projet et les acteurs sensés le porter ou l'incarner.
Chroniques chirurgicales ou des
restructurations et leurs effets !
Jean-Luc Minette
Pour qui a vécu l'expérience au moins une fois dans sa vie, il y a l'avant restructuration et un après sensiblement différent. Vouloir appréhender un tel évènement comme une sorte de parenthèse dans la vie de l'entreprise est une gageure. Que la motivation de l'opération soit strictement de caractère économique ou plutôt organisationnel elle entrainera de fait une rupture du contrat social dont les effets seront multiformes et impacteront à la fois le collectif mais aussi chaque salarié concerné ou non par le plan de sauvegarde de l'emploi.
A l'instar des opérations chirurgicales dont les protocoles sont précis et conditionnés par des exigences techniques et physiologiques, l'opération de restructuration dans sa phase juridique est elle aussi relativement encadrée. Malheureusement la comparaison ne va guère au-delà. Point de véritable phase pré opératoire et encore moins de phase(s) post opératoire en matière de restructuration. Pourtant la justesse et le fondement de ces différentes étapes n'est plus à justifier dans un cadre chirurgical. Très souvent le DRH dispose de peu de temps avant l'annonce et se consacre presque entièrement à la procédure et autres obligations documentaires et peu ou trop peu aux salariés, or, le processus chirurgical commence bien avant l'entrée dans le bloc opératoire et vise à amener le patient dans les meilleures conditions.
Une fois la procédure de consultation engagée, la plupart des DRH accomplissent au mieux des conditions ambiantes leur rôle de « chirurgien » de circonstance. Mais qu'en est-il des phases post opératoires ?
Dans le domaine de la chirurgie cardio-vasculaire on distingue plusieurs phases qui encadrent la phase opératoire proprement dite :
* Une phase pré opératoire visant à optimiser l'état général du patient avant l'intervention.
* La phase opératoire proprement dite qui se déroule dans le bloc et aux abords du bloc jusqu'au réveil du patient.
* Puis commence la séquence post opératoire en 3 phases distinctes, une phase post opératoire hospitalière qui peut durer de quelques jours à plusieurs semaines, période durant laquelle le corps médical s'assure d'un retour progressif à la normale sur les fonctions vitales. Au terme de cette première phase post opératoire démarre alors la phase dite post hospitalière immédiate dans laquelle s'inscrit la convalescence active et qui dure de 3 à 6 semaines. Enfin, intervient l'ultime phase ô combien critique pour la suite des évènements, la phase qualifiée de maintenance qui est assurée par les praticiens habituels et qui vise à apporter les conseils appropriés en matière d'hygiène, de diététique, ainsi que les thérapeutiques d'accompagnement.